La cour d’appel de Montpellier, le 22 septembre 2022, vient de condamner pour dol un promoteur qui n’avait pas hésité à sous-entendre, dans les brochures publicitaires éditées pour la vente d’appartements en résidence services, que le loyer était garanti.
Elle ajoute que le promoteur devait alerter les acquéreurs sur les risques de loyers impayés. Cette obligation d’alerter les investisseurs vaut également à mon avis pour la baisse de valeur du bien.
La sanction du dol a été la nullité de la vente.
La décision mérite d’être reproduite en partie.
« Selon la plaquette de commercialisation présentée par ‘Les jardins de St Benoît’ avec le logo Garrigae investissements et le numéro RCS 447’690’660, le projet d’investissement, à [Localité 17], est présenté comme un investissement dans une résidence de tourisme située dans une région déclarée « comme la plus dynamique en France ». Elle précise que «le Languedoc connaît une rapide croissance dans le tourisme international» et que la résidence sera gérée par une société dirigée par l’ancien « directeur commercial du Club Méditerranée et PDG du Club Med Australie et USA ».
Cette documentation stipule : « le propriétaire à l’avantage de bénéficier d’un bien en pleine propriété avec un revenu garanti, sans les ennuis et les incertitudes qui vont avec la location et l’entretien du bien. Le revenu locatif garanti est de l’ordre de 2,5 à 4,5% par an en fonction de la situation du bien lui-même et de la part d’utilisation personnelle sollicitée ».
Le projet de bail commercial meublé, annexé à l’acte de réservation stipule « un loyer annuel en numéraire TTC fixé à 4,76 % du prix d’acquisition HT (ce qui correspond à 4,50% HT » et le bail signé le 15 janvier 2008, avant la signature de l’acte de vente prévoit « un loyer numéraire annuel fixé à € 12 138 TTC équivalent à 4,76 % TTC du montant investi par le bailleur du montant de l’investissement soit 255 000 euros HT ».
Il ressort de ces documents, que contrairement à ce que soutiennent la SCCV Les Jardins de Saint Benoit et la SARL HPA Holding, l’élément essentiel qui a permis de convaincre M. [D] [F] et Mme [M] [W] [R] épouse [T] est la garantie de l’investissement présentée dans la documentation commerciale et non la seule économie fiscale consistant en la récupération de TVA du fait de l’activité de meublé.
Si la documentation commerciale « Les jardins de St Benoît » fait référence à la fin du texte à « une garantie de rentabilité locative », la mention expresse de « revenu garanti sans les ennuis et les incertitudes qui vont avec la location et l’entretien du bien » située dans le corps du texte, trompe l’investisseur étranger sur la réalité de la garantie.
M. [D] [F] et Mme [M] [W] [R] épouse [T] à la lecture de ces documents commerciaux, du prévisionnel et du bail signé dès la réservation avec la reprise expresse dans le paragraphe « Loyers », de la mention, en plus du montant du loyers, 4,76 % du prix d’acquisition HT du montant de l’investissement soit 255 000 euros, qui n’est pas une mention généralement précisée dans la rédaction des baux, alors que le bail est conclu pour 9 années et que le montant des loyers pour cette période ne représente pas cette somme, pouvaient légitiment faire croire à une garantie de paiement et non à la garantie de la seule rentabilité.
En présentant à M. [D] [F] et Mme [M] [W] [R] épouse [T] un revenu et une rentabilité garantis, « sans les ennuis et les incertitudes de la location » tant sur la durée que dans son montant, tel que justifiés par le prévisionnel et le bail signés lors de la réservation, les sociétés ont induit les époux [T] en erreur et justifié leur investissement, qu’ils n’auraient pas réalisé, à ces conditions, s’ils n’avaient pas été assurés de cette garantie, la seule défiscalisation si elle entrait dans leur décision, étant insuffisante à elle seule, par rapport aux risques d’une opération réalisée à l’étranger et le prix du bien de 55 m2.
Il devait également l’avertir des risques éventuels d’impayés ou de révision à la baisse des loyers en cas de conjoncture défavorable et de la nécessité de couverture du risque par une assurance des loyers impayés si elle était possible, s’agissant d’une location commerciale.
Le promoteur ne démontre pas avoir donné cette information aux époux [T], lors de la signature des différents actes, le 24 septembre 2007, le 15 janvier 2008 et le 18 septembre 2009, dans le but de les inciter à contracter, malgré les risques encourus qui leurs ont été cachés.
Auteur : Me Thibault du Manoir de Juaye, avocat à la Cour.
Publié par Erin B. le 13 octobre 2022.
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